Captive Wild Woman

(Captive Wild Woman)

 L'histoire

Fred Mason revient d’une campagne en Afrique et en Asie d’où il a rapporté nombreux d’animaux dont des tigres, des lions et une gorille. Dompteur dans un cirque aux intérêts duquel il est associé, il est fiancé à Beth Colman. Celle-ci inquiète pour la santé de sa sœur, l’emmène voir le docteur Sigmund Walters, spécialiste réputé des problèmes glandulaires ; en fait, derrière cette façade, Walters, obsédé par le désir de créer des surhommes (ou surfemmes), fait des recherches secrètes, sans le moindre scrupule. Invité à visiter le cirque, il est fasciné par le gorille femelle, qu’il fait rapidement voler par un employé qu’il soudoie. Dès l’animal dans son laboratoire, il s’applique à la transformer en humaine…

John Carradine (Dr Sigmund Walters), le savant fou réécrit les théories de l’évolution ! - Captive Wild Woman
John Carradine (Dr Sigmund Walters), le savant fou réécrit les théories de l’évolution !

Le petit mot de Francis SCHALL

Voilà de la série B de chez série B ! Film culte, CAPTIVE WILD WOMAN fait parti de ces films dont on parle, dont on voit depuis des décennies des photos dans les meilleures revues de cinéma de genre Fantastique/SF et les livres sur le sujet, mais que peu ont vu.

L’histoire de Neil P. Varnick (auteur également de LA TOMBE DE LA MOMIE - 1942), qui louche évidemment vers les expériences du Docteur Moreau de H. G. Wells, est assez simpliste mais tout à fait efficace. En fait, nous avons ici deux film en un (déjà très court dans son ensemble : soixante et une minutes). Un : l’histoire du savant cinglé classique, mais une histoire bien plus folle que tant d’autres du genre qui s’embourbent souvent dans les clichés les plus éculés ; et une chronique sur le dressage de fauves, traité quasiment en documentaire avec des séquences entières (parfois redoublées !) du célèbre dompteur Clyde Beatty, censé être le héros Fred Mason (joué par Milkton Stone). Les amateurs de numéros de cirque (pensons à ceux très réussis aussi du Cirque des horreurs) se régaleront –mais le spectateur lambda également, tant ces moments sont impressionnant, mêlant dizaines de tigres et de lions.

Acquanetta (Paula Dupree), le gorille devenue femme : Darwin n’aurait pas fait mieux ! - Captive Wild Woman
Acquanetta (Paula Dupree), le gorille devenue femme : Darwin n’aurait pas fait mieux !

Après ses grands succès de films de monstres et de figures mythiques du fantastique et de la SF, (FRANKENSTEIN - 1931, DRACULA, L'HOMME INVISIBLE - 1933, LE LOUP-GAROU - 1941, L'ETRANGE CREATURE DU LAC NOIR - 1954, etc.) la Universal du début des années quarante traîne les pieds jusqu'à sa fusion avec International Pictures en 1946. Les budgets deviennent microscopiques, cela se ressent…

Le casting nous permet de retrouver des habitués de la série B, et ces interprètes sont parfaits. De John Carradine en docteur Sigmund (salut Freud !) Walters, décidé de rafraîchir et d’accélérer les théories de l’évolution de Darwin, à l’exotique Acquanetta, nous retrouvons Evelyn Ankers, une des reines du cinéma bis de l’époque (nombreuses prestations dont dans LE LOUP-GAROU de George Waggner ; LE SPECTRE DE FRANKENSTEIN d'Erle C. Kenton – 1942 ; LE FILS DE DRACULA de Robert Siodmak – 1943 ; THE MAD GHOUL de James P. Hogan – 1943 ; LA VENGEANCE DE L'HOMME INVISIBLE de Ford Beebe – 1944 ; TARZAN ET LA FONTAINE MAGIQUE de Lee Sholem - 1949), et Fay Helm (LE LOUP-GAROU ; NIGHT MONSTER de Ford Beebe – 1942 ; LES MAINS QUI TUENT de Robert Siodmak - 1944).

Avec plus d’une centaine de films à son actif, John Carradine (1906–1988), immense acteur américain à la scène comme à l’écran, est particulièrement remarquable dans bon nombre des films d’horreur (LE CHAT NOIR de Edgar G. Ulmer avec Bela Lugosi - 1934 ; LA FIANCEE DE FRANKENSTEIN de James Whale - 1935 ; REVENGE OF THE ZOMBIES de Steve Sekely - 1943 ; LA MAISON DE FRANKENSTEIN – 1944, avec Boris Karloff et LA MAISON DE DRACULA - 1945, avec Lon Chaney Jr.) Il est un habitué des rôles de scientifiques dérangés et est remarquable ici dans ce registre.

Retour de la belle à l’instinct primitif… - Captive Wild Woman
Retour de la belle à l’instinct primitif…

Acquanetta, elle, est une de ces actrices exotiques et sexy qui illumine les rêves des spectateurs. Indienne, elle est née dans une réserve Arapaho, avant de devenir un des plus célèbres mannequins à la fin des années trente. Ses talents d’actrice sont découverts en 1942 par le producteur Walter Wanger et elle est engagée à la Universal. Elle sera d’abord Ishya, dans LES MILLE ET UNE NUITS avec Sabu et l’année suivante elle rencontre Edward Dmytryk pour ce CAPTIVE WILD WOMAN. En 1944, elle récupère le rôle dans JUNGLE WOMAN de Reginald LeBorg ; surprise, Paula Duprée, la gorille-femme n’était pas morte et vit d’autres aventures dans la jungle !! Deux films qui lui valent une très grande popularité. Après John Carradine, c’est à Lon Chaney Jr., un autre des maîtres du film fantastique qu’elle donne la réplique dans DEAD MAN'S EYES (de LeBorg encore, en 1944 toujours). Après un accident sur le plateau de LE FANTÔME DE LA MOMIE (LeBorg une fois de plus !) qui l’oblige à quitter le tournage, elle revient en 1946, pour la R.K.O., en grande prêtresse face à Johnny Weissmuller/Tarzan dans TARZAN ET LA FEMME LEOPARD. Rien que pour elle, on regarderait CAPTIVE WILD WOMAN en boucle !

Acquanetta - photo de plateau pour Jungle woman (1941) - Captive Wild Woman
Acquanetta - photo de plateau pour Jungle woman (1941)

Les amateurs de SF auront peut-être croisé Milburn Stone (Fred Mason) dans LE VOL DU SECRET DE L'ATOME (1952) de Jerry Hopper ou L'INVASION VIENT DE MARS (1953) de William Cameron Menzies.

D’Edward Dmytryk (1908-1999), dont c’est ici le dix-septième films sur cinquante six, très important cinéaste américain, impliqué de trop près dans la “chasse aux sorcières” de McCarthy, nous ne ferons que rappeler quelques titres phares : LES ENFANTS D'HITLER (1943) un des meilleurs films antinazis américain ; LE CRIME VIENT A LA FIN (1944), une excellente adaptation de Raymond Chandler ; OBSESSION (1949), un fascinant film policier ; LA LANCE BRISEE (1954), un des premiers films prenant la défense des Indiens ; OURAGAN SUR LE CAINE (1954), avec Bogart ; L’HOMME AUX COLTS D'OR (1959), un des classiques du western, et LA RUE CHAUDE (1962), célèbre en particulier pour son splendide générique signé Saul Bass.

CAPTIVE WILD WOMAN est un petit film étrange, dual donc (la part SF et la part cirque), mais dont l’idée centrale de fiction, ramassant en un raccourci saisissant les théories de l’évolution de Darwin et l’inspiration de "L’île du docteur Moreau", présente un intérêt certain pour les passionnés de science-fiction. Mais c’est indubitablement la présence d’Acquanetta, et de fauves impressionnants, qui ont fait sa réputation légitime de film culte.