Gamera contre Gyaos

(Daikaijû kûchûsen: Gamera tai Gyaosu)

 L'histoire

Au Japon, le volcan Satai est entré en éruption, provoquant une réaction en chaine qui embrase les volcans Oyama, Myôjin et pour finir, au nord, le célèbre Mont Fuji. La reprise de l'activité volcanique du plus important volcan du pays attire Gamera qui plonge dans sa cheminée. A bord d'un hélicoptère, une équipe d'observateurs se rend dans la région afin d'étudier cette éruption et de se prononcer sur le sort de Gamera : s'est-il rassasié de sa chaleur ou bien a-t-il péri dans la lave ? Mais alors que l'hélicoptère survole les "montagnes jumelles", un rayon lumineux émis d'une grotte phosphorescente l'abat, le coupant littéralement en deux. Guidé par le jeune Eiichi, un journaliste apprendra à ses dépens qu'un volatile géant est l'auteur de ce méfait : l'éruption du Mont Fuji a tiré Gyaos d'un long sommeil…

Le monstre géant qui se trouve avoir un appétit insatiable pour la chair, fusse-t-elle humaine, fait fuir tous les paysans et éleveurs du coin et perturbe les travaux d'autoroute en cours dirigés par Tsutsumi. Le remue ménage finit par attirer Gamera. Après une séance d'intimidation, les deux bêtes se livrent combat. Mais devant la puissance du rayon de Gyaos, Gamera doit reculer. Malgré quelques tentatives les humains ne parviennent pas à stopper le monstre qui s'en va infliger de gros dégâts dans la capitale…

Les ouvriers de l'autoroute - Gamera contre Gyaos (Daikaijû kûchûsen: Gamera tai Gyaosu)
Les ouvriers de l'autoroute

Le petit mot du Doc

Egalement sous-titré LUTTE AERIENNE DES MONSTRES, GAMERA CONTRE GYAOS est le troisième volet des aventures de Gamera. Après en avoir laissé la direction à Shigeo Tanaka pour GAMERA CONTRE BARUGON (1966), Noriaki Yuasa reprend les commandes de la série et ne les quittera plus pour les films de l'ère Showa (période de l’histoire du Japon comprise entre 1926 et 1989). Avec GAMERA CONTRE GYAOS le studio Daei confirme sa place de concurrent direct de la Toho et de son monstre vedette Godzilla.

Gyaos l'oiseau-monstre - Gamera contre Gyaos (Daikaijû kûchûsen: Gamera tai Gyaosu)
Gyaos l'oiseau-monstre

Dans GAMERA (1965), le scénariste Nisan Takahashi (qui signera chaque épisode de l'ère) avait effleuré l'idée que les enfants puissent jouer un rôle notable dans les films de la tortue à réaction. Si l'idée ne fut pas reprise dans sa suite, la place des plus jeunes se confirme là sans demi-mesure. Le petit Eiichi est ici mis à l'honneur. Amoureux de Gamera, c'est lui qui va donner au monstre ailé son patronyme : Gyaos, rapport au bruit strident de ses cris puisque, selon l'enfant, il fait (je cite) "Gya"… C'est également Eiichi qui oriente les militaires (quand il ne leur donne pas la solution) pour contrer Gyaos, leur expliquant que le monstre ne sortant que la nuit devrait être sensible à la lumière. Il leur donnera aussi la "bonne" idée de mettre le feu à la forêt… pas très écolo tout ça, mais c'est une autre époque ! Et comme si tout cela ne suffisait pas à démontrer que l'enfant est le véritable héros du film (et le chouchou du monstre), Gamera vient le sauver des griffes de Gyaos et le ramène à ses parents. Lui aura trouvé une confortable place sur sa carapace et pour une fois Gamera se sera déplacé sans tournoyer comme une soucoupe volante. Enfin, comme pour enfoncer le clou, le film se termine sur une chansonnette enfantine en l'honneur de la tortue…

Eiichi à dos de Gamera - Gamera contre Gyaos (Daikaijû kûchûsen: Gamera tai Gyaosu)
Eiichi à dos de Gamera

On connait déjà les aptitudes de Gamera, mais qu'en est-il de celles de son nouvel ennemi ? Après le lézard rampant Barugon, Gyaos virevolte dans les airs. Le volatile, qui s'apparente plus à un avion à réaction (ou à un cerf-volant !) qu'à un redoutable ptérodactyle, possède une tête en forme de fer à repasser qui rougit lorsqu'il s'épuise. Capable de régénérer ses extrémités, amateur de chair et de sang, il peut produire un rayon lumineux qui découpe tout ce qu'il touche. Gyaos est également un extincteur ambulant qui fera pâlir de jalousie nos pompiers qui luttent chaque année contre les feux de forêts. N'aimant pas cet élément (tout le contraire de Gamera), dame nature l'a ainsi bien doté.

Vous l'avez compris, la véracité scientifique est bien loin de faire foi. Mais s'agissant d'un Kaiju Eiga, on ne s'en étonnera pas, cela fait partie du genre. Cette règle posée, scénaristes et réalisateurs s'en donnent à cœur joie sans peur du ridicule. On appréciera l'imagination fertile des humains pour tenter de venir à bout du monstre, en particulier le "piège" élaboré qui consiste à l'appâter en lui présentant une fontaine de sang artificiel placée sur un tourniquet qui n'a pour résultat que de lui donner le tourni (on ne sait pas trop dans quel but d'ailleurs). A mourir de rire aussi le professeur Aoki et sa très complète documentation sur l'anatomie du monstre dont personne ne soupçonnait l'existence la veille. Et ses savantes explications sur la résonance, les ultrasons et la longueur d'onde… Mais la science a ses limites et Aoki l'avoue lui-même lorsqu'un militaire lui demande d'où vient le rayon lumineux de Gyaos ; il répond "C'est surement l'expression de la vengeance ou de la colère de Gyaos." Autre question ? On s'amusera aussi beaucoup d'un humour plus fin tel ces deux ouvriers, véritables Laurel et Hardy nippons qui, sans importance particulière, survivent le long du film comme un film rouge. Et au-delà de ce duo comique, le rayon de Gyaos qui découpe très proprement une voiture pleine de journaliste dans le sens de la longueur sans que cela nuise à son fonctionnement… ni aux journalistes!

Suivi des opérations - Gamera contre Gyaos (Daikaijû kûchûsen: Gamera tai Gyaosu)
Suivi des opérations

Si l'humour, volontaire ou involontaire, fait la singularité du genre, les effets spéciaux sont aussi sa marque de fabrique. On passera sur les quelques fils devinés çà et là pour s'attacher aux maquettes. Celles-ci sont employées dés que possible, y compris pour filmer des scènes qui auraient certainement pu l'être en live. Histoire de coût sans doute ! Mais il faut bien l'avouer, ces plans de maquettes sont magistraux et font tout le bonheur de ces films, à la manière du travail réalisé par Gerry et Sylvia Anderson sur LES SENTINELLES DE L'AIR (1964), CAPITAINE SCARLET (1967) ou autre DANGER PLANETE INCONNUE (1969). Le réalisateur en joue d'ailleurs ouvertement lorsqu'un plan découvre une voiture qui passe immanquablement pour une magnifique maquette et qui s'avère en réalité être un jouet de l'enfant.